Des fois je pense à ma vie et je me pose des questions. « Pourquoi je suis en Suisse? Pourquoi je ne suis pas avec mes amis, avec ma famille, en Sicile? »
C’est difficile à expliquer mais parfois, je m’arrête et je pense à tout ce que j’ai fait avant de venir en Suisse, à tous mes amis, à toute ma famille. Des fois je parle avec des gens et je me demande s’ils comprennent combien ma vie est difficile.
Parce que les gens ne regardent parfois pas tout ce qu’un garçon a traversé durant toute sa vie. Les gens, souvent, ne regardent que le présent des personnes.
Si quelqu’un rit quand on le regarde, on pense que ça va, qu’il va bien. On a l’habitude de regarder l’extérieur d’une personne et on ne regarde pas ce qui s’est passé tout au long de sa vie.
Si quelqu’un s’habille bien, on pense qu’il vit bien, on ne pense pas à comment elle a gagné de l’argent pour s’acheter des beaux habits.
C’est difficile d’aller à l’école mais je ne montre pas aux gens ma tristesse, ma difficulté de venir en classe, parce que c’est un choix de vie.
Il arrive que les gens me disent: « Si tu n’aimes pas rester un Suisse, pourquoi tu ne retournes pas dans ton pays? ». Les gens ne savent pas ce qui se passe maintenant dans mon pays et que c’est difficile d’avoir un futur. C’est pour ça que je reste en Suisse: pour avoir un bon futur et que mes parents soient fiers de moi.
Des fois je ne pense pas à ma vie, surtout quand je joue au foot. C’est un sport important pour moi et je ne sais pas comment je vais réagir quand je vais devoir arrêter de jouer. Ça fait rire mes parents, mais c’est vrai, quand je joue, je ne pense plus à ma vie.
Quand ils rient, mes parents, je suis super content parce que je sais les sacrifices qu’ils font tous les jours pour m’acheter des trucs. Mes parents, quand ils me voient rigoler, ils sont contents. C’est pour ça qu’ils nous achètent tout. Parce qu’ils aiment nous voir rigoler.
Mais chaque jour c’est difficile pour moi. J’aimerais tellement retourner en Italie, aussi pour voir mes parents contents. J’aimerais bien retourner à l’école; monter dans le bus et voir tous mes amis; parler ma langue….
Petit à petit, quand je retourne au pays, je me rends compte que je suis toujours plus différent d’eux. Là-bas, quand ils parlent de l’école, je suis toujours à côté, j’écoute mais je ne parle pas. Mes amis comprennent ma difficulté, c’est pour ça que je les aime bien.
J’aimerais trop retourner dans mon pays et continuer ma vie normale, mais je peux pas.
Antonio